
Réédition du billet du 30 mars 2015
Écoutez Maria Casares, puis X
Je vis, je meurs
Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J'ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuis entremêlés de joie.
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Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure ;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.
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Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.
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Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.
Louise Labbé
Commentaire de Cécile Coulon, romancière, nouvelliste et poétesse :
Ce sonnet de Louise Labbé (1524-1566), surnommée la Belle Cordière, met en évidence les contradictions profondes de la nature humaine, en particulier dans sa relation à l’amour et au désir. À travers une série d’antithèses et un rythme alternant entre exaltation et souffrance, Louise Labé exprime l’instabilité émotionnelle propre à l’existence. Elle illustre la dualité des sentiments, l’inconstance du bonheur et l’illusion du contrôle, révélant ainsi une humanité tiraillée entre espoir et désillusion. Pour la poétesse Cécile Coulon, "Je vis, je meurs" dépasse la simple évocation de la passion amoureuse pour devenir une réflexion poignante sur la quête de stabilité, dans un monde en perpétuel mouvement.


