Association Encrier - Poésies

Rencontre avec Louise Labbé Rencontre avec Louise Labbé : sonnet XIII

Écoutez Suzanne Flon

XIII

Oh si j'estois en ce beau sein ravie


De celui là pour lequel vois mourant :


Si avec lui vivre le demeurant


De mes cours jours ne m'empeschoit envie :


Si m'acollant me disoit : chere Amie,


Contentons nous l'un l'autre, s'asseurant


Que ja tempeste, Euripe, ne Courant


Ne nous pourra desjoindre en notre vie :


Si de mes bras le tenant acollé,


Comme du Lierre est l'arbre encercelé,


La mort venoit, de mon aise envieuse :


Lors que souef plus il me baiseroit,


Et mon esprit sur ses levres fuiroit,


Bien je mourrois, plus que vivante, heureuse.

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13

Oh ! si j'étais emportée sur la belle poitrine


de celui pour lequel je me meurs :


si l'envie ne m'empêchait pas de vivre


le peu de temps qu'il me reste  :


Si en m'enlaçant il me disait : « chère Amie,


rendons-nous heureux l'un l'autre », il s'assurerait ainsi


que jamais la tempête, Euripe, ou un courant


ne pourra nous séparer durant notre vie :


si, alors que je le tenais enlacé dans mes bras,


comme le lierre encercle l'arbre,


la mort venait, envieuse de mon bonheur :


lorsque tout doucement il m'embrasserait,


et que mon esprit sur ses lèvres fuirait,


je mourrais bien plus heureuse que je ne le serais vivante.