Association Encrier - Poésies

Rencontre avec Apollinaire Rencontre avec Apollinaire : Nos étoiles

Nos étoiles

La trompette sonne et résonne,


Sonne l’extinction des feux.


Mon pauvre cœur, je te le donne


Pour un regard de tes beaux yeux.


Et c’est l’heure, tout s’endort,


J’écoute ronfler la caserne,


Le vent qui souffle vient du Nord,


La lune me sert de lanterne


Un chien perdu crie à la mort.


La nuit s’écoule, lente, lente,


Les heures sonnent lentement


Toi, que fais-tu, belle indolente


Tandis que veille ton amant


Qui soupire après son amante,


Et je cherche au ciel constellé


Où sont nos étoiles jumelles


Mon destin au tien est mêlé


Mais nos étoiles où sont-elles ?


Ô ciel, mon joli champ de blé….


Hugo l’a dit célèbre image


Booz et Ruth s’en vont là-haut


Pas au plafond sur le passage


Comme au roman de Balao


Duquel je n’ai lu qu’une page


Un coq lance « cocorico »


Ensemble nos chevaux hennissent


A Nice me répond l’Echo


Tous les amours se réunissent


Autour de mon petit Lou de Co


L’inimaginable tendresse


De ton regard parait aux cieux

Mon lit ressemble à ta caresse

Par la chaleur puisque tes yeux


Au nom de Nice m’apparaissent


La nuit s’écoule doucement


Je vais enfin dormir tranquille


Tes yeux qui veillent ton amant


Sont-ce pas ma belle indocile


Nos étoiles au firmament


Nîmes, le 3 février 1915

Guillaume Apollinaire, Poèmes à Lou