Association Encrier - Poésies

Rencontre avec Baudelaire Rencontre avec Baudelaire : Le goût du néant

Le Goût du néant

Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte,

L’Espoir, dont l’éperon attisait ton ardeur,

Ne veut plus t’enfourcher ! Couche-toi sans pudeur,

Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle butte.


Résigne-toi, mon cœur ; dors ton sommeil de brute.


Esprit vaincu, fourbu ! Pour toi, vieux maraudeur,

L’amour n’a plus de goût, non plus que la dispute ;

Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte !

Plaisirs, ne tentez plus un coeur sombre et boudeur !


Le Printemps adorable a perdu son odeur !


Et le Temps m’engloutit minute par minute,

Comme la neige immense un corps pris de roideur ;

Je contemple d’en haut le globe en sa rondeur

Et je n’y cherche plus l’abri d’une cahute.


Avalanche, veux-tu m’emporter dans ta chute ?