ATTENTION
Ce texte est faussement attribué à C. de Pisan : lire le commentaire ci-dessous qui précise :
" c’est une pièce anonyme incluse dans des chansonniers du 16e siècle qui a été faussement attribuée à cette autrice, notamment dans l’anthologie de poésie de Pierre Seghers"
Merci à Madame Sarah Delale, autrice d'une thèse sur Christine de Pisan (et du livre Diamant brut-Interpréter les manuscrits de C. de PIZAN,édité chez DROZ)de nous avoir signalé cette erreur
À qui dir’- elle sa peine,
La fille qui n’a point d’ami ?
La fille qui n’a point d’ami,
Comment vit-elle ?
Elle ne dort jour ni demi
Mais toujours veille.
Ce fait amour qui la réveille
Et qui la garde de dormir.
À qui dir’-elle sa pensée,
La fille qui n’a point d’ami ?
Il en a bien qui en ont deux,
Deux, trois ou quatre,
Mais je n’en ai pas un tout seul
Pour moi ébattre.
Hélas ! mon joli temps se passe,
Mon téton commence à mollir.
À qui dir’- elle sa pensée,
La fille qui n’a point d’ami ?
J’ai le vouloir si très humain
Et tel courage que demain
En mon jeune âge
J’aimerais mieux mourir de rage
Que de vivre en un tel ennui.
À qui dir’- elle sa pensée,
La fille qui n’a point d’ami ?
Commentaires 1
Bonjour,
Cette chanson n’est pas de Christine de Pizan, c’est une pièce anonyme incluse dans des chansonniers du 16e siècle qui a été faussement attribuée à cette autrice, notamment dans l’anthologie de poésie de Pierre Seghers, et qui est totalement contraire à la conception que Christine de Pizan se faisait de l’amour. Il s’agit donc d’une volonté moderne de « corriger » les idées de l’autrice médiévale en l’assimilant de manière apocryphe aux lieux communs et au style de la poésie amoureuse du 16e siècle, dans un splendide anachronisme (le « tétin » qui commence à mollir est un pur #seiziemesiecle).
Voici les sources :
L’édition de cette ballade au 19e siècle (époque du Gay Sçavoir et des chorales et orphéons) par Gaston Paris, p. 13 :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/b...
Paris ne signale pas qu’il édite la 1e strophe d’après une autre mise en musique par Francesco de Layolle
(visible par exemple dans le tome 1 du Parangon des Chansons de Jacques Moderne, voir ici folio 15 : https://stimmbuecher.digitale-samml... ),
alors que le texte de la chanson dans le manuscrit qui lui sert de base est différent. Le manuscrit en question (Bibliothèque nationale de France, fonds français 12744) a été numérisé est visible ici (voir le folio IXr):
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/b...
Comme vous voyez, l’histoire du texte publié sur cette page est à l’image des manipulations que la société moderne a pratiquées à partir des sources pour parvenir à une image du Moyen Âge (en l’occurrence de la Renaissance) qui puisse l’intéresser et lui apparaître attrayante.
Auriez-vous la gentillesse de corriger cette page web ? La présence de cette attribution erronée sur internet consolide et perpétue sa diffusion et l’a propagée jusque dans ses anthologies féminines pour enfants… c’est rendre un hommage assez pervers à une femme qui s’est battue toute sa vie pour continuer à dire et écrire que l’amour courtois, c’est à dire l’amour adultère, menait les femmes à la répudiation, à la mort par assassinat et au déshonneur social.
Si vous cherchez des pièces authentiques de Christine de Pizan, je vous renvoie à une édition complète de sa poésie lyrique :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/b...