Association Encrier - Poésies

Rencontre avec Jules Supervielle Rencontre avec Jules Supervielle : La fable du monde : Le corps

Réédition du billet du 28 février 2018

Écoutez Jean Starobinski

La fable du monde

Le Corps

Ici l'univers est à l'abri dans la profonde température de l'homme

Et les étoiles délicates avancent de leurs pas célestes

Dans l'obscurité qui fait loi dès que la peau est franchie

Ici tout s'accompagne des pas silencieux de notre sang

Et de secrètes avalanches qui ne font aucun bruit dans nos parages,

Ici le contenu est tellement plus grand

Que le corps à l'étroit, le triste contenant..

Mais cela n'empêche pas nos humbles mains de tous les jours

De toucher les différents points de notre corps qui loge les astres,

Avec les distances interstellaires en nous fidèlement respectées.

(L'homme et le zodiaque -livre d'heures Très riches heures du Duc de Berry)

Homme_planetaire_1490.jpg (Homme astrologique -1490)

Comme des géants infinis réduits à la petitesse par le corps humain, où il nous faut tenir tant bien que mal,

Nous passons les uns près des autres, cachant mal nos étoiles, nos vertiges,

Qui se reflètent dans nos yeux, seules fêlures de notre peau.

Et nous sommes toujours sous le coup de cette immensité intérieure

Même quand notre monde , frappé de doute,

Recule en nous rapidement jusqu'à devenir minuscule et s'effacer,

Notre coeur ne battant plus que pour sa pelure de chair,

Réduits que nous sommes alors à l'extrême nudité de nos organes,

Ces bêtes à l'abandon dans leur sanglante écurie.

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(Commentaire de Édouard Pignon) Homo_signorum.png Gravure dans un almanach de 1580

Voici un lien vers une exposition virtuelle de le BNF "Ciel et Terre" : un monde imaginé-le ciel dans l'homme :ICI