Écoutez James Ollivier
Auteur inconnu d'après Pierre de Ronsard (1524-1585)
Chanson du printemps retourné(1586)
(Il s'agit d'un "retournement" du poème de Ronsard : Quand ce beau printemps je vois( vous trouvez ce poème dans un autre billet);ce poème "retourné" évoque les guerres de religions, la peste et les misères de l'époque)
Quand ce dur printemps je voy je cognois
Toute malheurté au monde
Je ne voy que toute erreur et horreur
Courir ainsi que fait l'onde
Il n'y a plus d'amitié ny pitié
Et non plus de cortoisye
Il n'y a plus de support ny confort
Tout n'est plus que fascherie
Nous voyons notre prochain qui a faim
Endurer quasi la rage
Sans lui donner verre d'eau ny morceau
C'est bien un lasche courage
Nous voyons les paysans indigents
Demandant partout leur vie
Un bissac pour tout recol sur son col
D'une pauvreté émie
(Nous voyons les grands amys ennemys
Prest à se tuer l'ung l'autre
Nous voyons le père cher deschasser
Son enfant pour prendre un autre
Nous voyons l'enfant divers et pervers
Battre son père et sa mère
Nous voyons un estranger nous manger
C'est un cruel vitupère)
Nous voyons tant de voleurs pleins d'horreur
Qui pillent tuent et saccagent
Ne craignant ni Dieu ny Roy d'un esmoy
Vomissent dix mille rages
Nous voyons les amoureux rigoureux
Laissant leurs gentes maitresses
Au lieu d'être gracieux et joyeux
Portent dix mille tristesses
Nous voyons un jeune enfanté six ans
Renier Dieu et sa mère
Et faisant comparaison sans raison
Donne horreur par trop sévère
(Nous voyons les pauvres biens terriens
Diminuer d'heure en heure
Et les gentisl arbrisseaux vers et beaux
Qui par le pied soudain meurent)
Nous avons eu tant de maux et travaux
Guerre famine et peste
Cruauté horreur esmoy et effroy
Qui nous rompt quasi la teste
Qui est cause de ce mal dur fatal ?
Nos péchés ords et terribles
Nous sommes comme bruteaux
Animaux
A bien faire inutiles
(Nous ne tenons plus de foy ni de loy
Tant nous sommes gens ignares
Nous sommes esblouis des cieux gratieux
A tous nos peschez barbares)
(Et changeons notre vouloir d'un espoir
Et aussy nostre coustume
Recognoissant nostre Dieu en tout lieu
Nous ostera l’amertume)
J'ai voulu par passe temps ce printemps
Vous montrer estre fragile
Afin de vous corriger et changer
Sans estre plus inutile