Association Encrier - Poésies

Quelques textes des ateliers d'écriture d'Encrier87 à Limoges Texte de SOPHIE

Dans cette vaste solitude, dans cette plaine abandonnée, il se croyait perdu. Pourtant, le groupe n'était pas loin, soudé par les amitiés réciproques entretenues au fil des générations. Car c'est ainsi, et seulement ainsi, que les Amérindiens pouvaient chasser dignement.

Je les voyais au loin et je m’apprêtais à les rejoindre au galop.

Depuis que j’avais découvert par hasard le couloir du temps, j’avais exploré bien des pans de l’histoire, noué bien des amitiés à travers les siècles, même parmi la noblesse des Louis XVI et XV, aussi parmi des personnes du Moyen-âge ; ceux qui m’avaient séduite le plus, se trouvaient sur le nouveau continent appelé l’Amérique avec ses grandes étendues sauvages et surtout ses merveilleux peuples fiers, respectueux de la nature, ses belles tribus, comme les Sioux, les Cheyennes, les Mohicans, les Apaches, les Algonquins, etc… ;chacune avait des traditions toutes pleines de valeurs morales. J’avais surtout une préférence pour les Apaches et les Sioux. Ces derniers m’avaient vraiment adoptée, devenant pour eux, Louve Shane, nom donné par Cheval Dansant, une des femmes un peu guerrière de la tribu, car oui il en existait aussi, comme Weetamo , une chef Pocasset ou Buffalo Calf Road Woman, une cheyenne qui a participé à la plus célèbre victoire Indienne, Little Big Horn, Nanye-Hi, une Cherokee. Toutes ces amérindiennes et leurs sœurs étaient des piliers essentiels des tribus.

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J’étais donc arrivée par l’accès du couloir du temps sur une colline dominant la plaine, sur mon fidèle appaloosa en vue de mes frères et sœurs qui suivaient un gigantesque troupeau de Bisons, animal essentiel dans la vie des tribus des plaines. J’aperçus, ma sœur de sang, Etoile Argentée, Cheval Dansant aussi était là, comme Plume Sauvage, Petit Bison et d’autres. Je lançais mon Appaloosa pour aller à leur rencontre, heureuse de les retrouver. Ma sœur de Sang avait dû sentir mon retour, car elle fut la premere à se retourner et venir au galop à ma rencontre. Nous nous saluâmes, je sentais mon cœur battre très fort comme le sien devait le faire. Nous avions partagé tant de galops dans les plaines, de parties de chasse, comme si nous avions toujours été sœurs ; Cheval Dansant bientôt arriva aussi à notre hauteur, toute heureuse de me retrouver aussi. Elle n’avait pas le même attachement, mais nous avions une belle amitié et c’était elle qui m’avait appelée Louve Shane, car j’avais soigné et sauvé à mon retour une louve blessée ; ce nom me plut immédiatement et je l’adoptais.

Nous avons rejoint nos frères au galop, eux aussi contents de me revoir, dont Plume Sauvage, un valeureux chasseur et guerrier. Le groupe de chasseurs n’était là qu’en reconnaissance, car les bisons allaient être là pour plusieurs jours. Ils progressaient en plus un peu dans la direction du campement en divergeant un peu plus au sud. Une grande chasse allait être organisée dès le lendemain. Il fut décidé de rentrer au camp. J’étais heureuse de tous les retrouver après quelques mois d’absence et mon arrivée au campement fut salué par tous mes sœurs et es frères. Je fus accueillie par Akicita Tanka, la sachem de la tribu ; il y avait aussi Rivière Sauvage, une des sages et anciennes de la tribu, ainsi que tous les autres frères et sœurs. Akicita Tanka décida de faire une fête pour célébrer mon retour et celui des bisons. De ce fait, j’étais honorée de cela, comme si c’était moi qui avais conduit les bisons jusqu’ici, car ils avaient un peu d’avance, sur leur migration.

Le soir à la lueur des feux de camps, chants et danses rythmaient la fête de mon retour. Etoile Argentée me fit la surprise de m’avoir confectionné une robe de cérémonie. Elle était plus qu’une sœur pour moi, avec tout ce que nous partagions. Akicita Tanka avait aussi beaucoup de respect pour moi, comme moi j’en avais pour elle. C’était une sachem qui avait un immense respect des traditions, de la nature, qui m’avait accueillie comme si j’avais toujours été des leurs ; il est vrai que j’adorais cette culture ; enfant je regardais beaucoup les western, avait du mal avec les indiens ; évidement c’était des blancs qui faisaient ces films et montraient les indiens comme des affreux « peaux rouges » comme ils les appelaient, alors cela n’aidait pas. En grandissant, j’ai appris un peu plus de ces peuples fiers et hélas constaté l’horrible génocide, dont ils avaient été victimes par ces affreux hommes blancs, qui les a massacrés pour s’emparer des terres, pour leur soif de l’or, ou simplement par plaisir, déjà le début d’un racisme que je baptiserais « l’indianphobie » .Venant d’un futur qu’ils ne connaitraient jamais et qu’ils auraient du mal à comprendre, j’avais trouvé une explication rationnelle, racontant que parfois j’avais besoin de longs moments de solitude. J’avais déjà très mal de partir en sachant que mes sœurs et mes frères ne survivraient pas à l’invasion et la conquête des territoires par l’homme blanc et mon cœur était serré de savoir cela. J’avais quand même ce bonheur de les retrouver seulement quelques semaines après mon départ alors que dans ma vie du XXIème siècle, je restais plusieurs mois sans m’absenter. Je ne comprenais pas ce couloir du temps, mais l’essentiel était ailleurs. Le bonheur de les retrouver, d’avoir cette vie de liberté était immense, de les avoir comme une famille telle que je n’avais eue ; alors j’oubliais les malheurs qui ne manqueraient pas de surgir, que pour vivre l’instant présent dans ma tribu sioux, d’être Louve Shane, une squaw fière d’être au milieu des miens. Ce soir, c’était une grande cérémonie de chants, de danses, installée entre Cheval Dansant et Etoile Argentée, vêtements et peintures visages de cérémonie. nous vivions unies dans ce cérémonial et nos retrouvailles.

Le lendemain, nous nous retrouvions à préparer nos arcs, nos flèches pour la chasse ; le bison, cet animal qui nous nourrissait, nous habillait, était tellement important pour notre vie. Il revenait sur notre territoire et c’était le moment pour la grande chasse. Une certaine excitation régnait sur le camp et au milieu des autres chasseurs comme Plume Sauvage, Ours Intrépide, Aigle Blanc, Makaisi Té Wikahpi, je n’étais pas la dernière à me préparer avec Etoile Argentée. Cheval Dansant était partie en avant avec d’autres frères pour repérer le troupeau.

Quelques Minutes plus tard j’enfourchais mon appaloosa, le visage peint au rituel de la chasse, direction la grande plaine avec le groupe d’une quinzaine de frères rejoindre les éclaireurs de Cheval Dansant. Une fois sur place, après avoir observé la troupe qui broutait paisiblement, nous décidions d’attaquer par le milieu et un autre groupe par l’arrière. Puis après avoir assuré nos flèches, pris nos arcs, nous avons foncé vers les bisons suivant le plan établi. Nous en avons rapidement tué une demi-douzaine avant que tous s’affolent et se mettent à courir. Nous chevauchions sur les flancs du troupeau pour éviter d’être pris par l’un d’eux. J’en avais déjà abattu quand voulant tuer mon 4e mon cheval perdit l’équilibre en passant dans un fossé que je n’avais pas vu, je me retrouvais à terre, tandis que mon cheval s’était déjà  relevé et partait au galop, le temps que je me relève et à quelques mètres de moi, je vis un gros mâle me foncer dessus, il était trop tard pour que j’esquive, je me voyais déjà partie au pays des chasses éternelles, puis je le vis s’écrouler juste devant moi, une flèche en pleine tête, me protégeant en même temps du reste du troupeau qui évitait leur congénère de celui abattu par Etoile Argentée ; elle venait de me sauver la vie.

Quelques minutes plus tard, Etoile Argentée se plantait devant moi avec son cheval.

Alors ma sœur, tu ne tiens plus à cheval ?

Merci infiniment Etoile Argentée, tu m’a sauvé la vie, je n’oublierai jamais.

Je n’ai pas envie de te perdre ; avec qui j’irais galoper ? Tiens regarde, Plume Sauvage qui arrive avec ton cheval.

Je me retournais et vis mon appaloosa qui boitait un peu.

J‘ai regardé ton cheval, Louve Shane, il n’a rien, il lui faudra juste un peu de repos quelques jours.

Merci mon frère ; merci de me le ramener.

Allez monte derrière moi, fit Etoile Argentée, nous rentrerons comme cela pour ne pas fatiguer ton cheval. Nous allons rapporter les bisons au campement. Ce soir ce sera encore des danses.

Un peu plus tard au camp, tous les bisons étaient déjà en partie découpés, la viande prélevée pour le soir, puis celle qui sera séchée, et aussi la peau enlevéer pour faire des vêtements.

Je retrouvais Akicita Tanka, et je fis part de l’incident en remerciant de nouveau Etoile Argentée qui fut aussi remerciée par notre chef.

Tu es une brave, Etoile Argentée, tu as fait preuve de bravoure en tuant ce bison qui aurait pu enlever la vie de notre Sœur Louve Shane ; cela aurait été une bien grosse perte pour notre tribu. Désormais vous êtes liées encore un peu plus par les liens de fraternité. Toutes les deux êtes de belles squaws par vos valeurs et votre sagesse. Longue vie à vous deux.

Nous quittions notre sachem encouragées par ces fortes paroles pour nous préparer pour le soir, avec de nouvelles danses et des chants.

Je restais encore quelques jours dans la tribu, soignant mon appaloosa et aussi faisant quelques grandes galopades dans la plaine avec Etoile Argentée et Cheval Dansant. Je passais du temps aussi avec les papooses de la tribu, avec notre chef Akicita Tanka, ainsi qu’avec mes sœurs et mes frères.

La veille de mon départ, nous fîmes un ultime galop avec Etoile Argentée allant jusqu’à la rivière. Nous avons laissé nos chevaux, j’avais retrouvé mon fidèle appaloosa et nous nous sommes assises au bord de l’eau.

Alors, tu repars encore une fois ?

Oui ma sœur, je te l’ai dit, j’ai besoin de ces moments de solitude.

A chaque fois j’ai peur que tu ne puisses pas revenir, tu sais. Je prie le grand Esprit pour que tu reviennes vite.

Merci, je te remercie pour cela. Moi aussi je prie, pour retourner dès que possible auprès de vous.

Tu resteras définitivement un jour?

Peut-être, je ne peux rien te promettre.

Je l’espère. Tu sais, certains de nos frères dans des tribus éloignées ont entendu parler d’hommes blancs qui arrivent sur nos terres et cela me chagrine ; ils ne portent que désolations.

Ils ne sont peut-être pas tous méchants

Ils sont à craindre, ils n’apporteront rien de bons pour nos tribus.

Nous aurons bien le temps de voir ma sœur. Vivons le temps présent tu ne crois pas.

Oui, seulement tu repars demain.

Je reviendrai bien vite ma sœur. Toi et la tribu vous me manquez trop. Allez retournons doucement au camp, la nuit arrive.

Le lendemain, alors que toute la tribu était encore endormie, je quittais le camp le cœur gros, espérant revenir bien vite. J’avais encore la question de ma sœur en tête de savoir si un jour je resterais définitivement. J’avais déjà eu cette pensée auparavant, je n’y avais pas encore de réponse.

Commentaires 1

  • Alpico

    Belle évocation d'un monde qui n'existe malheureusement plus.Merci

    L'idée  d'une machine à remonter le temps fait partie des rêves de beaucoup de gens ...

    J'ai récemment découvert un chanteur franco-canadien ,Thomas Hellman, qui a produit deux albums sur les Rêves américains et dans le Tome 1 , il fait parler un tueur de bisons qui explique crûment la politique d'élimination des bisons : il est possible de l'écouter avec ce lien : :

    http://encrier87.fr/textes/index.ph...

    Vous connaissez peut-être le film épatant d'Arthur Penn, qui fait rêver lui aussi :  Little Big Man(1971),  avec Dustin Hoffmann :"Âgé de 121 ans, Jack Crabb, seul survivant du massacre de Little Big Horn, raconte son histoire à un journaliste.

    Adopté par une famille de Cheyennes, ce visage pâle est surnommé Little Big Man à cause de son immense courage. Un jour, toute sa tribu est massacrée par les Blancs et Jack est alors recueilli par un pasteur et sa femme. Le jeune homme est partagé entre ses origines indiennes et son nouveau peuple".(résumé de Wikipédia .)

    (Il existe un DVD de ce film disponible à la BFM ) :

    Liste des chapitres du film

    Le film est inspiré du livre ci-dessous

     

     

    Alpico