Encrier 87

Textes de Alpico Texte de Alpico du 28 novembre : Les flâneries de Poupette

:Poupette arrive près de son totem : un arbre fétiche sculpté par le vent ; il est perché sur la colline, elle vient souvent lui parler : elle ne se lasse pas de suivre les courbes folles de ses branches fragiles et dénudées.

Un essaim de corbeaux s’envolent de l’arbre en croassant : ils l’ont reconnue !

— « kra krarak krarak… Salut, Poupette. »

Maintenant Poupette fantasme sur une carte postale qu’elle a reçu ce matin —un envoi de Monsieur Panard ! —: le corps nu , de dos, d’un homme noir , une vraie sculpture :

— « Oh, qu’il est bizarre ce Mr Panard ! Et pas mise sous enveloppe , naturellement! »

Plus loin, elle découvre sur la plage voisine des bottines abandonnées et délacées, qui s’embrassent en silence . Ça l’intrigue :

— « Y aurait-il un naufragé dans les parages?»

Sur la jetée, les vagues aspirent à la tempête, qui gonflera les voiles . Des cumulus cotonneux — là-haut — invitent Poupette à s’envoler pour un voyage initiatique aux horizons secrets .

Plus loin, dona Serafina la chamanesse troglodyte cherche à atteindre l’extase en fumant un calumet aux herbes mystérieuses . Poupette la connait : autrefois Serafina l’a débarrassée de ses angoisses

— Tu viens me voir, Poupette?

—Pas aujourd’hui ,Sérafina

Un trouble vague envahit Poupette : cette sorcière lui fait un peu peur et l’attire en même temps.

Dans la brûlure de ses désirs inassouvis, elle attend qu’arrive une neige réparatrice .

— Qu’est-ce que l’esthétique du vide confrontée au TOUT inaccessible?

À cette question, le confort de Poupette s’envole.

Mais dans la blancheur du petit matin, là voilà qui espère, tout à coup, trouver bientôt la porte d’entrée du Paradis.

Au même moment, plongée dans un bain d’algues aux huiles essentielles, Églantine la sybarite , voisine et amie de Poupette, savoure, insouciante, un plaisir sans métaphysique tout en écoutant Shéhérazade de Maurice Ravel.

Églantine fredonne, après Régine Crespin :

«Asie,

Je voudrais m’en aller avec la goélette

Qui se berce ce soir dans le port,

Mystérieuse et solitaire.



Et qui déploie enfin ses voiles violettes

Comme un immense oiseau de nuit dans le ciel d'or …. »

Et elle s’abandonne dans son bain en faisant des petits clapotis avec ses pieds .

Églantine n’est pas du genre à se prendre la tête mais elle aime rêver ….

Poupette, elle, vient d’arriver devant le bar « À l’enseigne de la fille sans coeur » . C’est là qu’elle a rencontré Monsieur Panard il y a quelque temps autour d’un petit blanc sec.

Son errance et ses rencontres lui ont donné soif .

— Ah la barbe , le bar est fermé !

Au loin , une cloche sonne :

— Qui donc appelle-t-elle à cette heure?

Le vent se lève , Poupette frissonne .

Elle décide brusquement de rentrer chez elle .

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