T R O I S . . . 9h10. Quelques minutes encore et la longue disette pandémique de dix huit mois allait se terminer. Ils seraient quatre puisque Magda avait confirmé sa venue. ELLE repensa aux différents chemins qui furent les siens avant de militer pour l'écriture spontanée. D'abord la demande que lui fit Alterégo (ah !... un couple fusionnel...) lors de leur voyage au Japon. Il souhaitait qu'ELLE continue l'étude de la linguistique afin de devenir experte dans les usages comparés de l'apocope et de l'aphérèse. ELLE accepta bien qu'ayant découvert ces deux arts nippons fascinants : le Kakémono et l'Ikébana. ELLE ne les oublia pas, même en optant pour la classification de Dewey concernant, en français, l'orthographe et la phonétique. Ils avaient balancé entre le Japon et les States et, donc, ELLE serait, aujourd'hui, capable de disserter sur l'élaboration du wiskey du Comté de Bourbon, dans le Kentucky, maturé avec les céréales de la Corn-Belt ? Saurait-elle tout, enfin, sur la croissance des séquoias ? Songeuse ELLE surveillait le parking attendant l'arrivée des participants. Un spectacle incongru la frappa : deux filles juchées sur un Solex essoufflé tentaient de partir. Et les patinettes électriques alors !
9h15. ELLE accueillit les deux premiers participants avec plaisir car la reprise, après ce long interlude, s'avérait poussive. Sans doute un aspect du "Monde d'après..." où les bises-tradi cédaient la place aux checks. L'échange de questions-réponses naturel, les captiva, puis le thé avec des cannelés les fit patienter en espérant Magda...L'un des deux scripteurs demanda ce qu'ELLE pensait de cette citation de Modiano: "un brouillard de tristesse tomba sur son espoir..." , une métaphore connue, ELLE y répondit sans problème.
9h35.Allons ! Magda ne viendra plus...Installés ils lui demandèrent (!) si ELLE connaissait le philosophe auteur de cette pensée, un peu absconse : "...une apparence ostentatoire est-ce une apparence trompeuse ou une ostentatoire tromperie ?..." ELLE évita l'obstacle en proposant d'en faire l' inducteur de leur premier jeu . Ouf ! ces dix minutes arrivent à point...Décidément ces dix-huit mois délivraient des pensées erratiques très surprenantes...ELLE grattait son papier comme ses deux compagnons qui, eux, raturaient un peu trop... Cette année l'atelier était modifié : d'abord l'écriture spontanée ensuite deux semaines pour remanier, étoffer le texte de départ pour en faire, non pas un pavé, mais un but de lectures partagées.
9h55. Les deux exercices suivants donnèrent lieu à discussions animées, l'un disait que ce penseur était un égoïste qui réservait sa sapienza à des tenants de l'ostentation maniée lourdement, alors que l'autre le tenait pour un penseur éclectique capable de lever tous les verrous et loquets que les petits esprits, les rapiats du savoir installaient aux tournants des phrases comme pour protéger leurs sottes idées.
10h45. Nouvel inducteur au choix : soit un commentaire sur le titre du roman d'Olivier Poivre : "l'Amour à trois...",soit développer le goût prononcé de Nietzsche pour l'opéra de Bizet et surtout la libertaire Carmen, passionaria des femmes soumises... Le premier sujet fut jugé "hors de saison..." et c'est la belle espagnole qui rallia les courages. Pour cela il fallait bien 30 minutes. Tant mieux, pensa t'ELLE, cette reprise était plus intense que les événements passés ne l'annonçaient.
11h30. Jeu avec "...pourquoi la belle était elle si triste quand elle se dénudait..." vertigineux abîme ouvrant d'infinies perspectives insolubles...et jusqu'au clap de fin! Pas facile, certes, mais drôles les réponses...
12h15. Au revoir! ELLE insista : "et surtout, soyons plus de trois ! "
nb :texte d'imagination basé sur des faits partiels...Toute ressemblance avec...etc...serait...
