Le vent, l’enfant et le cerf-volant.
La petite-fille et son cerf-volant, on pouvait les apercevoir tous les jours, par tous les temps sur la plage du Trez, à Bénodet, une enfant différente des autres...elle ne lisait pas !
( Il y avait quelques années déjà, le père Noël, devant l ‘insistance de la demande à posséder un cerf-volant, avait compris que l’enfant avait un besoin vital de ce jouet et lui, d’ordinaire incorruptible s’était senti obligé d’ exaucer le voeu de la fillette.)
Quand elle n’avait pas de contrainte, on pouvait la rencontrer, près du phare, le visage tourné vers le ciel .
Elle n’aurait pas su dire comment cette passion était venue l’habiter, elle sentait simplement que c’est dans ce jeu qu’elle apprenait la vie, que ce silence de mots, cette fluidité de gestes, de mouvements entre elle, le vent et le cerf-volant la faisaient respirer.
Un jour, elle le savait, elle couperait le fil entravant le vol de l’oiseau- volant, elle se blottirait sur son dos et tous les deux se laisseraient emporter au gré du vent-ami .
Une inquiétude cependant ternissait son rêve et retardait le grand envol: et si un jour le vent ressemblait à tous les grands qu’elle connaît et si le vent un jour lui déclarait qu’il pourrait se changer en vent mauvais; il suffirait qu’il lui déclare par exemple: « je resterai ton ami SI… »
SI, ce mot si petit mais si venimeux, ce petit mot qu’elle connaît par coeur, on le lui a tellement répété surtout depuis la naissance de sa soeur, ce petit mot qui dès qu’elle l’entend la précipite dans un gouffre sans fond, ce mot, jamais elle ne l’acceptera, il a tué pour toujours pense-t-elle le mot qu’elle aimait plus que tout, le mot CONFIANCE.
Alors l’enfant tenace ne se laissera pas abattre et c ‘est d’abord sur un petit dériveur, un 4 20 qu’elle apprendra à faire face au vent, qu’il soit doux et ami ou coléreux et mauvais .
Seule face à la mer, elle naviguera par vent favorable puis, elle prendra la mer, par vent debout; elle chavirera, empannera, dessalera mais elle apprendra aussi à veiller au grain, à louvoyer, à étaler le vent, à le serrer, à sentir le vent du boulet… jamais elle ne perdra son cap!
C’est là qu’elle a appris la vie.
Plus tard, elle a retrouvé son cerf-volant qui l’attendait au grenier, elle a décidé que le moment était venu, elle est allée une dernière fois sur la plage, elle a fait voler son oiseau, elle a coupé la corde les reliant à la terre d’origine et elle est partie avec lui sur les ailes du vent, à la découverte du monde .