Une silhouette cloqui -cloquante progresse lentement sur l'avenue toute verte de Choisy La Grande .
Maurice vêtu de son pull rouge gris a faim .
Voilà plus d'un quart d'heure qu'il tente de rejoindre le magasin de saucissons farcis , de spaghetti par là , avec une salade , ça va de soi .
Moi qui ai froid et destin de rien , je comble d''abondance en regardant cet homme faire son plein . Je pars à ma manière rêvant que dans ces mains l'avenir le mène loin .
Devinant sa grâce et sa bonté c'est à ce moment précis que le lapin blanc apparaît . On le devine souple et gracile tout doux à souhait et pour cette raison sans doute , le vieux corps de Maurice se penche au plus près , de sa mémoire toute vive de ressentir chaleur de son duvet . Ainsi courbé , l'échine en arabesque , il touche l'animal docile , de ses doigts longs et charnus , et ce lien indiscret , transforme la poésie en des images en vrai .
Madame Graffe qui aime bien les récits entre homme et humains , voit ici de sa fenêtre une éloge aux corps célestes incertains puisque souvent dans ses livres elle rappelle l'animal que nous sommes et son fameux dessein .
Le reflet de cette scène inonde désormais une foule dont l'apparente apathie nourrit la réalité vers un état d'insouciance où le temps , suspendu en virgule , balance d'un rythme sourd , les heures cruciales d'un avenir aux reflets tranquilles .
Maurice se donne sans condition à cette joie subtile . Il erre entre bonheur et abandon dans ce décor où le silence parfois en dit si long .
Le lapin se laisse faire , je me projette en forêt .
Madame Graffe se prépare pour une nuit d'encre , et , le magasin se ferme sous l'avalanche des pensées .
Commentaires 1
Parfois ça a cloqui cloqué dans mon cerveau à la lecture , mais quelle tendresse , quelle poésie j'ai ressenti grâce au tour de magie de celle qui sait voir et mettre en mots les rencontres tendres et insignifiantes de la vie .