Encrier 87

Un objet dans la main et le sourire affleure :

C’est une carte postale en noir et blanc.  Au milieu d’autres elle tranche par sa composition impeccable, sa qualité, et son clin d’œil à notre jeunesse :

On est dans une rue de Paris

Il y a un solex, c’est un des premiers modèles, il est en parfait état, ses chromes brillent, j’avais oublié à quel point sa silhouette noire était élégante.

Derrière lui il y a une affiche publicitaire qui occupe tout un mur jusqu’à l’angle de la rue ou en contrepoint une plaque ancienne et rouillée en tôle emboutie indique la rue et son arrondissement.

On ne voit qu’une partie de l’affiche, il n’y a ni slogan ni marque pour détourner le regard d’une poitrine féminine qui occupe tout l’espace dans un plan serré.

Un haut de maillot couvre juste ce qu’il faut et laisse à découvert ce qui doit attirer : une douce vallée aux pentes agréables au regard. Le noir et blanc met en valeur les courbes et les ombres qu’elles génèrent.

Le solex n’est pas posé sur ses béquilles mais très légèrement appuyé sur le mur et donc sur l’affiche par sa poignée droite qui repose avec beaucoup de bonheur semble-t-il au creux ou les deux seins se réconcilient.

Il n’y a rien de provocant dans cette image parfaitement composé mais beaucoup d’humour.

On se dit que pour prendre son engin il faudra poser sa main là, la glisser en un geste affectueux contre le papier grossier de l’affiche et non dans ce doux vallon tentateur.

Ce qui est frappant dans cette image c’est aussi l’inversion des genres : le solex qui portait fièrement notre virilité adolescente parait fragile et montre une grâce et une féminine élégance.

L’affiche, par contre, s’impose avec détermination, se montre avec une fierté et une assurance très virile !!!

Le photographe a dû s’amuser pour faire ce cliché et moi, je me régale.