Anonyme des Song (XIie siècle)
Le Cri du coucou gris
Encre et couleurs sur soie . Musée de Shanghai
Texte de François Cheng, page60 :
La distance n'est pas grande entre le bec et le fruit, pourtant l'objet convoité paraît comme inaccessible. Le chant, le cri sont l'expression première et dernière de la nostalgie : écho de ce qui pour jamais demeure hors d’ atteinte. Un drame se joue là, le plus simple, le plus cruel : fils de la soif et de la faim, nous logeons toujours trop loin de ce que nous aimons.
À quoi l'abeille joueuse (en bas, à gauche du tableau) semble suggérer, narquoise : Eh bien, ne logeons nulle part, butinons sans fin !
L'artiste innommé qui s'exprime ici utilise la branche perchoir— prodigieuse de vie — comme vecteur ambigu de toute la tension qui gouverne la scène. Elle est ce qui sépare et ce qui relie, et les fruits en bouquet sont aussi la manifestation de l'intime « respiration » qui l'anime, qui la fait être. À ce degré de maîtrise des formes, simplicité et complexité en viennent à nous faire oublier ce qui les distingue.