La chambre du Pharaon noir-/Toulon, Hôtel des arts/ 2001
Extraits de Wikipedia
"Manuel Torre (1878-1933)est considéré comme l'un des plus influents cantaores gitans du début du xxe siècle, et comme l'une des figures représentatives du style de cante de Jerez. Sur scène ses prestations impressionnent le public, et c'est à son propos que Garcia Lorca parle pour la première fois de « duende » pour qualifier un état de transe lors de l'interprétation d'un chant flamenco. Manuel Torre, quant à lui, le définit ainsi : « Tout ce qui possède des sons noirs a du duende »(article sur Manuel Torre).
Aujourd'hui le duende sert à désigner ces moments de grâce où l'artiste de flamenco, ou bien le torero, prennent tous les risques pour transcender les limites de leur art, surmultiplier leur créativité, entrer dans un état second à la rencontre d'une dimension supérieure mystérieuse, et atteindre ainsi un niveau d'expression proprement inouï, lequel procède d'une sorte de transe d'envoûtement et provoque le même enchantement chez le spectateur. Federico García Lorca, le grand poète espagnol martyr de la première moitié du xxe siècle, a beaucoup investi ce concept en tant qu'il exprime particulièrement bien selon lui le « génie » du peuple andalou et l'âme espagnole."(article sur duende)
Jean-Paul Marcheschi, en 2009, dans l’émission Répliques(France-Culture) raconte, en substance , ce qui suit :
En 1922,Torre est invité lors du concours de cante jondo qui se déroule à Grenade à l'initiative de Federico Garcia Lorca et Manuel de Falla.
De Falla interprète une version pour piano de Nuit dans les jardins d’Espagne, une de ses oeuvres et Torre lui dit juste après : « Ah ce soir , Maître vous avez eu le duende »
Suite à une question de De Falla, Torre déclare :
« Le duende, c’est faire remonter dans la voix le buste du Pharaon noir »
Cette phrase mystérieuse, qui évoque la remontée dans la voix d’un "tronco" venu de la nuit d’Egypte, a ébloui Jean-Paul Marcheschi et de ça est née cette exposition de 2001 à Toulon intitulée Le Pharaon noir
J'ai trouvé cet écrit de Jean-Paul Marcheschi :
Extraits de Autres Sommeils (notes sur le Pharaon noir) :
Il faut en revenir au chant, au chant noir, à cette technique vocale, singulière et retorse, si difficile à saisir des cantaors andalous.
Mon Pharaon noir a surgi du registre sombre de la voix telle qu'on l'entend dans le cante rondo.
Il faut revenir à cette nuit du mois d'août 1922 à Grenade, lors du premier festival de canne rondo organisé par Manuel de Falia et Federico, Garcia Lorca.
Après le dîner, Manuel de Falla vient d'exécuter dans son carmen de Grenade la version pour piano des Nuits dans un jardin d'Espagne, devant Manuel Torres, le génial cantaor.
Manuel Torres (s’adressant à Falia)
— Maître, ce soir, vous avez eu le duende.
—Mais qu'est-ce que le duende ?
—Le duende, c’est faire remonter dans la voix le buste (tronco) du pharaon noir.
Il est des phrases étranges qui peuvent changer le cours d'une vie.
Le point de départ —l’appel secret —de toutes mes œuvres depuis des années se tient dans cette métaphore sonore.
Le corps noir, le corps sculpté qui se dresse dans la chambre des époux est né d'une comparaison.
Disproportion entre la fragilité d'un tel départ, qui n'est qu'à peine une image, et l’avalanche torrentielles de signes, de corps, de figures qu’elle a fait naître
Page 232 du livre Jean-Paul Marcheschi, édité en 2001 chez Somogy .