Vie d’Essenine
Vie d’Essenine chantée par un paysan russe
De la région de Riazan
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Le plus triste et le plus tendre des garnements
Fut batailleur , battu , saignant pendant trente ans ..
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Il fit d’abord le fier dans nos guerre d’enfants ,
Sa mère en l’injuriant torchaient son nez sanglant .
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Mais plus tard nul ne vint soigner son âme en sang ,
Des femmes bien vêtues l’aimèrent méchamment .
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Il a chanté les chiens , les arbres , les blés mûrs ,
Mais les hommes jamais , puisqu’il n’était pas dur .
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Tous les fils de bourgeois s’unirent , le meurtrirent ,
Le fusil vert des branches ne put le secourir .
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Et nous-mêmes hélas ! l’avons laissé languir ,
Car nous ne savions plus s’il fallait le chérir .
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Il était plus que seul lorsqu’il marchait tout seul ,
Il embrassait la nuit l’érable et le tilleul .
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« — L’as-tu donc vu dans l’ombre , ô mère sans parole ? «
« — Oui , mais pâle , ses yeux me rendent maigre et folle ! «
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Pour oublier son mal il dut faire le mal ,
Même alors il aimait saluer un cheval .
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Il fut bientôt partout l’homme dont nul ne veut :
Quand il revint à nous le blé fut silencieux .
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« Voyez ! je n’ai pas pris les pas d’un grand monsieur :
« Toi , ton métier , c’est d’être riche . Fils . Adieu . «
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De voir que tout son monde était si malheureux ,
Un soir , il se cacha , regarda dans le bleu .
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Vit le bleu dans le ciel , vit le bleu dans ses veines ,
Se tua sans penser ,sans croire à notre peine .
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Sur les bouleaux s’endort notre complainte vaine .
La neige de sa gloire a contrasté nos plaines .
Armand Robin
André Markowicz précise à la page 88 de son livre « Partages ,Volume2 »(édité chez inculte/dernière marge en septembre 2016) :
« Ce texte est au centre du premier livre de__ Armand Robin , « Ma vie sans moi »
Il ajoute : « Robin (a) écrit une vie d’Essenine —fils de paysan russe déraciné dans les milieux littéraires et voué au suicide, qui (est) en fait une vie de Robin , fils de paysan breton déraciné dans les milieux littéraires et voué au suicide. »
Il s’agit bien d’un poème de Robin et non d’une traduction d’un poème d’Essenine : »C’est une sorte de quintessence de la poésie d’Essenine ,avec la plupart de ses thèmes » (page 89)