Le chagrin de l’amour
Le piaillement d’un moineau sur le toit
La lune étincelante par tout le ciel
Et toute cette harmonie fameuse, les feuillages,
Avaient bien effacé l’image de l’homme, et son cri d’angoisse
Mais une fille surgit, aux lèvres rouges de deuil,
Qui sembla la grandeur du monde en larmes,
Condamnée comme Ulysse et les vaisseaux qui boitent
Au loin, fière comme Priam assassiné.
Surgit, et dans l’instant les gouttières bruyantes,
La lune qui grimpait à un ciel vide
Et toute cette lamentation dans les feuillages
Ne purent qu’être l’image de l’homme, et tout son cri.
W.B. Yeats, octobre 1891 – traduction Yves Bonnafoy
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The Sorrow of Love
The brawling of a sparrow in the eaves,
The brilliant moon and all the milky sky,
And all that famous harmony of leaves,
Had blotted out man’s image and his cry.
A girl arose that had red mournful lips
And seemed the greatness of the world in tears,
Doomed like Odysseus and the labouring ships
And proud as Priam murdered with his peers;
Arose, and on the instant clamorous eaves,
A climbing moon upon an empty sky,
And all that lamentation of the leaves,
Could but compose man’s image and his cry.
W.B. Yeats