Association Encrier - Poésies

Rencontre avec des chansons Rencontre avec Marcabru (XIIe siècle) : Escotatz - Écoutez

Réédition du billet du 14 juin 2022

Écoutez Claude MARTI

ESCOTATZ

Dirai o mon agrandança /  Je vous dirai, sans hésitation


D’aquel vèrs la commençant / L e commencement de ce poème


De rason à la semblança / Les mots en ont l’apparence de la vérité.


Escotatz ! / Ecoutez !

................. / Qui hésite à bien faire

............... / a semblance de pervers



Amor coma la beluga / L’amour comme l’étincelle


D’un res met fòc à la bruga / D’un rien met le feu à la bruyère


E la flamba ven caluga /Et la flamme devient folle


 Escotatz ! / Ecoutez !


A pena vos amaluga / A peine vous touche-t-elle


Que sentissetz lo reumat / que vous sentez le roussi.



  Joventut es putanièra / Jeunesse ne se méfie pas


L’amor leva l’'amor pilha / Et l'Amour lève à sa guise son impôt

son degut a la resquilha  / Partout où il fait son nid




  Escotatz ! / Ecoutez !


Nos fas chinchar en familha / Chacun en prend sa part


E qual n’es pas endeutat ? / et ne s’avise  point qu’il en demeure endetté



  L’amor es de mala raça /  L’amour est de male race :


Sens espasa nos estraça / Sans épée il nous meurtrit plus que la guerre,


Mai que guèrra tua, amassa / plus que la guerre,


Escotatz ! / Ecoutez !


Sens tisana nos enmasca / Sitôt que l’amour l’embrase


Lo pus brave ne ven fat / le plus brave en devient fou.



  Amor es tot en falsièra / L’amour est tout en fausseté,


Pren lo mèl daissa la cèra / prend le miel, laisse la cire,


Pelada dona la pèra / pour lui seul pèle la poire.


Escotatz ! / Ecoutez !


E s’es plasent son lantèra / Mais est plaisant son « lanlère »


Solament coa-copat / seulement la queue coupée.



 Marcabrun filh Marcabruna / Marcabrun, fils de Marcabrune,


Foguèt fait en tala luna / Est né en telle lune


Qu’amor sap coma se degruna / Qu’il sait ce qu’Amour égrenne

Escotatz ! / Écoutez !

Que jamai s'engarcet d'una /Jamais ne s’éprit d’aucune,

Ni s'engarcet d'amitat. / ni d’amour ni d’amitié.

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   Je vous dirai, sans hésitation,

Le commencement de ce poème

Les mots en ont l’apparence de la vérité.

Ecoutez !

Qui hésite à bien faire, a semblance de pervers.


  L’amour comme l’étincelle

D’un rien met le feu à la bruyère

Et la flamme devient folle

Ecoutez !

A peine vous touche-t-elle que vous sentez le roussi.


  Jeunesse ne se méfie pas

Et l'Amour lève à sa guise son impôt,

Partout où il fait son nid.

Ecoutez !

Chacun en prend sa part et ne s’avise  point qu’il en demeure endetté.


   L’amour est de male race :

Sans épée il nous meurtrit plus que la guerre,

Nul mieux que lui ne nous enchante

Ecoutez !

Sitôt que l’amour l’embrase le plus brave en devient fou.


  L’amour est tout en fausseté,

prend le miel, laisse la cire,

pour lui seul pèle la poire.

Ecoutez !

Mais est plaisant son « lanlère », seulement la queue coupée.


  Marcabrun, fils de Marcabrune,

Est né en telle lune

Qu’il sait ce qu’Amour égrenne

Ecoutez !

Jamais ne s’éprit d’aucune, ni d’amour ni d’amitié.

MARCABRU-"Troubadours aujourd'hui" Editions CPM Raphaële-les-Arles. 1975

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Réédition du billet du 7 juin 2015 : version (en français actuel) de Henri Gougaud

Écoutez Henri Gougaud

Écoutez

Celui qui compose le vers et le rythme

Ne sait d'où vient la danse

Marcabrun m'a fait le rythme

Mais il ne sait où le chant prend sa source


Amour va comme le tison

Qui s'endort d'un œil sous la cendre

Puis brûle charpente et maison

Écoutez

Celui que flamme sait pourfendre

N'habite plus en sa raison


Jadis l'amour était tout droit

Mais il devint tordu et rêche

À présent, il ruine et rudoie

Écoutez

Quand il ne peut plus mordre, il lèche

Plus âprement que fait le chat


L'amour est un cheval chagrin

Qui sur sa croupe vous entraîne

Bride abattue, galop sans fin

Écoutez

Vous chevauchez à perdre haleine

Mourant de soif, mourant de faim


D'amour je sais les rituels

Je connais cet aveugle louche

Qui parle tout sucre et tout miel

Écoutez

S'il vous pique moins qu'une mouche

Il vous emplit l'âme de fiel


Marcabrun fils de Marcabrune

Fut engendré sous telle lune

Qu'il sait d'amour toute coutume

Écoutez

Jamais il n'en aima aucune

Jamais aucune ne l'aima