Encrier 87

Textes de Lilah Texte de Lilah : Jeu 3

La fête des mères

Un bon mois avant la fête des mères, les petites filles de la classe du CM2 de l’école , avec leurs économies, se précipitaient chez la mercière, madame Beaubelicou, pour acheter le napperon qu’elles broderaient et offriraient à leur maman le jour de la fête .

A l’époque, les institutrices ne faisaient pas entrer dans leur enseignement cette célébration .

Aux récréations, les petites filles s’asseyaient au bord du préau, les pieds dans le caniveau de la cour et elles brodaient avec bonheur et frénésie . Les écheveaux de fil de coton brillaient de toutes les couleurs. Je ne sais plus si le travail se commençait par la bordure du napperon qui se faisait au point de feston ou par le motif central qui lui se cousait au point de tige . Certains ouvrages étaient même entourés de dentelle .

C’est émouvant de repenser à ces fillettes, futures mamans, qui probablement débordaient de tendresse pendant qu’elles piquaient le tissu à tous petits points rapprochés pour que l’oeuvre soit la plus belle possible pour leur maman.

D’ailleurs , ce n’était pas forcément les meilleures en classe qui réalisaient le plus bel ouvrage!

La petite fille de l’histoire aurait voulu faire partie du clan des brodeuses mais elle ne pouvait pas; être à l’écart la rendait malheureuse et pourtant il lui était impossible de rejoindre le groupe.

Malgré tout, deux jours avant la fête, un élan inattendu l'a fait courir chez la mercière. Il restait 3 napperons:les laissés pour compte.

Elle en a choisi un avec 3 écheveaux de fils à broder et pendant 2 jours, en toute hâte, intégrée dans la tribu des « couseuses », au bord du préau, elle a voulu rattraper le temps perdu.

Sur le napperon carré, en coton, elle a fait fleurir les pâquerettes pré- dessinées qu’elle a choisies jaunes . Quant au tour du napperon il sera rouge .

Il fallait faire vite pour que le cadeau soit prêt à terme .

Alors les points de tige couraient en trop grandes enjambées et les points de feston étaient bien trop loin les uns des autres!

La petite fille n’a pas trouvé le résultat très réussi, mais elle était contente de se sentir comme les autres.

Le fameux dimanche, comme tous les dimanches à midi, elle est allée manger chez ses parents (qui la ramèneraient ensuite là où ils l’avaient placée).

Elle a offert son cadeau.

La mère a dit que le napperon était beau… et il a disparu à jamais.

Commentaires 1

  • DiNëR

    ...émouvant et choquant ! on aimerait connaitre le nom de la petite fille orpheline d'une famille qui la rejette...Causette peut-être ?

    DiNëR

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