Psaume
Personne ne nous pétrira de nouveau dans la terre et l'argile,
personne ne soufflera la parole sur notre poussière.
personne.
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Loué sois-tu, Personne.
C'est pour toi que nous voulons
fleurir
A ta
rencontre.
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Un rien,
voilà ce que nous fûmes, sommes et
resterons, fleurissant :
la rose de Rien, la
rose de Personne
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Avec
la clarté d'âme du pistil
l'âpreté céleste de l'étamine,
la couronne rouge
du mot pourpre que nous chantions,
au-dessus, ô, au-dessus
de l'épine.
Paul Celan, in Anthologie bilingue de la poésie allemande, Bibliothèque de la Pléiade 1993, page 1188.
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Niemand knetet uns wieder aus Erde und Lehm,
niemand bespricht unsern Staub. Niemand.
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Gelobt seist du, Niemand.
Dir zulieb wollen
wir blühen.
Dir
entgegen
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Ein Nichts
waren wir, sind wir, werden wir
bleiben, blühend :
die Nichts-, die
Niemandsrose
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Mit
dem Griffel seelenhell,
dem Staubfaden himmelswüst,
der Krone rot
vom Purpurwort, das wir sagen
über, o über
dem Dorn.
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"Un poème de Celan est un absolu, bien que lui-même en soit venu à postuler et à décréter sa réalisation impossible. C'est un absolu brouillé avec le langage, brouillé avec l'entreprise littéraire ; brouillé avec les critères et les pratiques dominants de la communication. Polyglotte — Celan est un traducteur magistral de six ou sept langues —, le plus novateur et le plus grand des poètes lyriques allemands après Hölderlin a vécu comme presque insupportable son propre recours à la langue allemande ... L'allemand est la langue des bouchers qui exterminèrent ses parents, la prodigalité humaine du monde dans lequel lui-même grandit. L'allemand est la langue qui a formulé des obscénités antisémites et une volonté d'anéantissement sans précédent. ... Pour Celan, aucun artifice de purgation, aucun oubli conditionné, ne saurait débarrasser l'allemand du virus de l'infernal. ... Comment une poésie, une prose dont la parataxe subtile, dont la précision radicale confine à la magie, mais dont la source et le sous-texte durables sont Auschwitz et la condition spectrale du Juif par la suite, peut-elle orner, enrichir, perpétuer la vie de la langue allemande ? "
George Steiner, extrait de pages consacrées à l'insoluble dilemme de Paul Celan, dans Grammaires de la Création,Gallimard 2001, page 241 et suivantes.