Sur son site :finestagione Emmanuel F. a publié et traduit un poème de Giosuè Carducci : Jaufre' Rudel . En le remerciant , je reproduis ci-dessous le poème puis sa traduction:
Jaufre' Rudel
Dal Libano trema e rosseggia
Su ’l mare la fresca mattina :
Da Cipri avanzando veleggia
La nave crociata latina.
A poppa di febbre anelante
Sta il prence di Blaia, Rudello,
E cerca co ’l guardo natante
Di Tripoli in alto il castello.
In vista a la spiaggia asïana
Risuona la nota canzone :
“Amore di terra lontana,
Per voi tutto il cuore mi duol".
Il volo d’un grigio alcïone
Prosegue la dolce querela,
E sovra la candida vela
S’affligge di nuvoli il sol.
La nave ammaina, posando
Nel placido porto. Discende
Soletto e pensoso Bertrando,
La via per al colle egli prende.
Velato di funebre benda,
Lo scudo di Blaia ha con sé :
Affretta al castel : - Melisenda
Contessa di Tripoli ov’è ?
Io vengo messaggio d’amore,
Io vengo messaggio di morte :
Messaggio vengo io del signore
Di Blaia, Giaufredo Rudel.
Notizie di voi gli fur porte,
V’amò vi cantò non veduta :
Ei viene e si muor. Vi saluta,
Signora il poeta fedel.
La dama guardò lo scudiero
A lungo pensosa in sembianti :
Poi surse, adombrò d’un vel nero
La faccia con gli occhi stellanti :
- Scudier, - disse rapida - andiamo.
Ov’è che Giaufredo si muore ?
Il primo al fedele rechiamo
E l’ultimo motto d’amore.
Giacea sotto un bel padiglione
Giaufredo al conspetto del mare :
In nota gentil di canzone
Levava il supremo desir.
- Signor che volesti creare
Per me questo amore lontano,
Deh fa che a la dolce sua mano
Commetta l’estremo respir !
Intanto co ’l fido Bertrando
Veniva la donna invocata ;
E l’ultima nota ascoltando
Pietosa risté sull’entrata :
Ma presto, con mano tremante
Il velo gittando, scoprí
La faccia ; ed al misero amante
- Giaufredo, - ella disse, - son qui.
Voltossi, levossi co ’l petto
Su i folti tappeti il signore
E fiso al bellissimo aspetto
Con lungo respiro guardò.
- Son questi i begli occhi che amore
Pensando promisemi un giorno ?
È questa la fronte ove intorno
Il vago mio sogno volò ?
Sí come a la notte di maggio
La luna da i nuvoli fuora
Diffonde il suo candido raggio
Su ’l mondo che vegeta e odora,
Tal quella serena bellezza
Apparve al rapito amatore,
Un’alta divina dolcezza
Stillando al morente nel cuore.
- Contessa, che è mai la vita ?
È l’ombra d’un sogno fuggente.
La favola breve è finita,
Il vero immortale è l’amor.
Aprite le braccia al dolente.
V’aspetto al novissimo bando.
Ed or, Melisenda, accomando
A un bacio lo spirto che muor.
La donna su ’l pallido amante
Chinossi recandolo al seno,
Tre volte la bocca tremante
Co ’l bacio d’amore baciò,
E il sole da ’l cielo sereno
Calando ridente ne l’onda
L’effusa di lei chioma bionda
Su ’l morto poeta irraggiò.
Giosuè Carducci Rime e ritmi 1888
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Jaufré Rudel
Du Liban le frais matin
frémit et s'empourpre sur la mer :
Venant de Chypre fait voile
Le vaisseau de la croisade latine.
A la poupe, haletant de fièvre
Se tient le prince de Blaye, Rudel,
Et il cherche d'un regard ondoyant
Le château haut perché de Tripoli.
En vue de la mer d'Asie
Résonne la célèbre chanson :
"Amour de terre lointaine,
Pour vous, souffre tout mon cœur".
Le vol d'un gris alcyon
Accompagne cette douce plainte,
Et au-dessus de la voile blanche
Le soleil s'afflige de nuages.
Le navire manœuvre et accoste
Dans le port tranquille. Seul et pensif
Bertrand descend,
En prenant le chemin de la colline.
Il porte le bouclier de Blaye
Recouvert d'un voile noir ;
Il se hâte vers le château : - où est
Mélisande, comtesse de Tripoli ?
Je viens en messager d 'amour,
Je viens en messager de mort :
Je suis le messager du seigneur
De Blaye, Jaufré Rudel.
Il eut vent de votre renommée,
Il vous aima, vous chanta sans vous voir :
Il vient et se meurt. Le poète fidèle,
Madame, vous salue.
La dame regarda l'écuyer
Longuement, l'aspect songeur :
Puis elle se leva, couvrit d'un voile noir
Son visage aux yeux étincelants :
- Écuyer, dit-elle aussitôt, partons.
Où Jaufré se meurt-il ?
Allons porter à cet amant fidèle
Le premier et l'ultime mot d'amour.
Jaufré gisait sous une belle tente
Dressée face à la mer :
En un chant doux et suave
Montait son suprême désir.
- Seigneur, toi qui voulus créer
Pour moi cet amour de loin,
De grâce, fais qu'en sa douce main
je pose mon dernier soupir !
Au même moment, avec le fidèle Bertrand,
Arrivait la dame invoquée ;
Et la dernière note entendant,
Elle resta sur le seuil avec piété :
Mais vite, d'une main tremblante,
Jetant son voile, elle découvrit
Son visage ; et dit au malheureux amant :
- Jaufré, je suis venue.
Le seigneur se retourna, se souleva
sur les épais tapis,
Et fixant éperdument le beau visage
Il dit avec un long soupir :
- Sont-ce là les beaux yeux
Qu'Amour en songe un jour me promit ?
Est-ce là le front autour duquel
Mon beau rêve vola ?
Ainsi que dans la nuit de mai
La lune émergeant des nuages
Répand son blanc rayon
Sur la nature épanouie et parfumée,
Ainsi cette beauté sereine
Apparut à l'amant extasié,
Une haute et divine douceur
S'insinua dans le cœur du mourant.
- Comtesse, qu'est ce donc que la vie ?
C'est l'ombre d'un songe fugace.
La brève fable est achevée,
La vérité immortelle est l'amour.
Ouvrez vos bras au malheureux.
Je vous attends au prochain rendez-vous.
Et maintenant, Mélisande, à un baiser
Je confie l'esprit qui s'en va.
La dame penchée sur son pâle amant
Le serra contre sa poitrine,
par trois fois, la bouche tremblante
lui donna le baiser d'amour.
Et le soleil dans le ciel serein
descendu en jouant sur les eaux
irradia sa chevelure blonde
répandue sur le poète mourant.
(Traduction de Emmanuel F.)