Œdipe et son énigme
Quadrupède à l’aurore, à midi profilant
Sur le ciel sa droiture, et dans le jour qui baisse
A trois pattes clochant débile : la déesse
Durable voyait ainsi son frère vacillant,
L’homme. Mais vers le soir voici qu’un homme arrive,
Et tombe au piège qu’il résout : dans le miroir
De cette monstrueuse image il a pu voir,
Bouleversé, notre destin et sa dérive.
Nous sommes tous Œdipe ; il a tout su de tous,
Il a vu cette longue et triple bête : nous.
Je suis ce que je fus et ce que je vais être
Tout ensemble. Mais je serai anéanti
Si je laissai ma loi difforme m’apparaître.
Clément, Dieu m’a donné le progrès et l’oubli.
Traduit de l’espagnol par Nestor Ibarra In, « Œuvre poétique, 1925 -1965 »Gallimard (Du monde entier), 1970
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Edipo y el enigma
Cuadrúpedo en la aurora, alto en el dia
y con tres pies errando por en vano
ámbito de la tade, así veía
la eterna esfinge a su inconstante hermano
el hombre, y con la tarde un hombre vino
que descifró aterrado en el espejo
de la monstruosa imagen, en el reflejo
de su declinación y su destino.
Somos Edipo y de un eterno modo
la larga y triple bestia somos, todo
lo que seremos y lo que hemos sido.
Nos aniquilaria ver la ingente
forma de nuestro ser ; piadosamente
Dios nos depara sucesión y olvido.